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l’aiglon blanc des illinois

La Salle s’était retiré un peu, ne voulant pas troubler par sa présence, cette scène de famille ; sortant de sa poche une petite gourde d’eau-de-vie, il dit au chasseur :

« Ceci pourrait peut-être le ranimer ; donne-le à la femme.

— Veux-tu essayer l’eau-de-feu ? dit Nika, se rapprochant de l’Indienne.

— Je n’en ai pas !

— En voici ; essaie de lui en faire avaler quelques gouttes. »

La femme prit la gourde et la porta aux lèvres du moribond, elle réussit à lui en faire prendre une gorgée. Il se redressa soudain, galvanisé par l’effet de l’alcool :

« Femme, dit-il, femme fidèle, l’Aigle va te quitter !

— Ho ! Non ! Non ! gémit celle-ci.

— Aiglon Blanc, continua l’Indien, dont la voix faiblissait, tu seras toujours brave, fier,… jamais perfide… jure-le !

— L’Aiglon le jure, ô père, dit gravement l’adolescent, les yeux pleins de larmes.

— Je meurs, femme… je meurs… le serpent… ho… »

Un spasme convulsif le secoua… il retomba lourdement, il était mort !

Les deux visiteurs ne savaient trop que faire ; La Salle voulut dire à l’Indienne quelques mots de sympathie mais elle ne l’entendit même pas ; elle s’était jetée sur le cadavre de son mari et gémissait avec désespoir, tandis que l’Aiglon, accablé par son chagrin filial, se tenait droit et immobile au chevet de son père.

Nika s’approcha de l’adolescent et passa son bras autour de ses épaules :

« Tu étais son ami, fit l’Aiglon, tu sais combien il était bon !

— C’est un grand chef qui disparaît, dit gravement le chasseur ; je pleure avec toi le fier Aquipanetin[1] l’Aigle du Rocher, le plus valeureux des Illinois ! »

  1. Un chef sioux a aussi porté ce nom.