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l’aiglon blanc des illinois

Une chose le chagrinait : il craignait d’oublier la langue française, qu’il avait été si joyeux d’apprendre ; il ne manquait pas de répéter matin et soir la petite prière que lui avait apprise le bon religieux, ce qui avait le double résultat de lui rappeler sa foi chrétienne, tout en lui faisant retenir quelques mots français.

Un jour, il aperçut un missionnaire dans la bourgade.

Il s’empressa d’aller lui parler, et le jésuite, surpris de l’entendre s’exprimer en français, ne manqua pas de s’intéresser à ce jeune Indien blanc, qui, malgré son allure de non-civilisé et sa parure de plumes blanches, avait une personnalité si différente de celle des autres indigènes de cet âge. Il se fit raconter son histoire, et chercha à faire revivre dans l’âme de l’adolescent les notions chrétiennes implantées par le bon franciscain, notions qui s’estompaient un peu dans la jeune mémoire de l’Aiglon Blanc. Malheureusement, le missionnaire ne séjournait pas dans ce bourg, où il ne comptait qu’un très petit nombre de catéchumènes, mais il y revenait de temps en temps et ne manquait jamais de revoir son nouvel ami. Ces conversations empêchèrent l’Aiglon d’oublier son français.

Les années passèrent ; l’adolescent était devenu un jeune homme grand et musclé ; une petite moustache se dessinait sur sa lèvre supérieure, ce qui étonnait chez un Indien ; mais son apparence un peu étrange dans le milieu où il se trouvait, ses goûts et ses aptitudes différentes des autres, tout cela s’attribuait sans contredit au Génie des airs.

Un autre chef de tribu avait remplacé le Loup Noir, mort de petite vérole, l’année précédente. Il se nommait l’Orignal, était d’une nature cruelle et belliqueuse, haranguait souvent les jeunes guerriers et cultivait en eux la haine des Visages-Pâles.

On ne voyait plus le missionnaire dans la bourgade ; pour plaire au nouveau chef, les Onéidas avaient chassé la Robe Noire !