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Essais de sociologie

la partie Nord par le clan du pélican de la phratrie Krokitch, et, dans la partie sud, par le clan de la phratrie Gamutch qui porte le même nom. On a ainsi quatre secteurs dans lesquels se localisent les autres clans. Comme chez les Omahas, l’ordre selon lequel ils sont disposés exprime les rapports de parenté qui existent entre leurs totems. Les espaces qui séparent les clans apparentés portent le nom du clan primaire, dont les autres sont des segments. Ainsi les clans 1 et 2 sont appelés, ainsi que l’espace intermédiaire, « appartenant au soleil » ; les clans 3 et 4 ainsi que la région intercalée sont « complètement au cacatois blanc ». Le cacatois blanc étant un synonyme de soleil, ainsi que nous l’avons déjà montré, on peut dire que tout le secteur qui va de l’est au nord est chose du soleil. De même les clans qui vont de 4 à 9, c’est-à-dire qui vont du nord à l’ouest sont tous des segments du pélican de la première phratrie. On voit avec quelle régularité les choses sont orientées.

En résumé, non seulement là où les deux types de classification coexistent, comme c’est le cas chez les Zuñis, nous avons des raisons de penser que la classification par clans et par totems est la plus ancienne, mais encore nous avons pu suivre, à travers les différentes sociétés que nous venons de passer en revue, la manière dont le second système est sorti du premier et s’y est surajouté.

Dans les sociétés dont l’organisation a un caractère totémique, c’est une règle générale que les groupes secondaires de la tribu, phratries, clans, sous-clans, se disposent dans l’espace suivant leurs rapports de parenté et les similitudes ou les différences que présentent leurs fonctions sociales. Parce que les deux phratries ont des personnalités distinctes, parce que chacune a un rôle différent dans la vie de la tribu, elles s’opposent spatialement ; l’une s’établit d’un côté, l’autre de l’autre ; l’une est orientée dans un sens, l’autre dans le sens opposé. À l’intérieur de chaque phratrie, les clans sont d’autant plus voisins, ou, au contraire, d’autant plus éloignés les uns des autres que les choses de leur ressort sont plus parentes ou plus étrangères les unes aux autres. L’existence de cette règle était très apparente dans les sociétés dont nous avons parlé. Nous avons vu, en effet, comment, chez les Zuñis, à l’intérieur du pueblo, chaque clan était orienté dans le sens de la région qui lui était assignée ; comment, chez les Sioux, les deux phratries, chargées de fonctions aussi