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3. Les lettrés deviennent rois.


Or, c’est, tout au contraire, la réforme, le changement des idées admises et des goûts établis qui fut le but marqué des écrivains du xviiie siècle.

Leurs ouvrages décident des révolutions de l’État. Ce n’est rien de le constater : il faut voir qu’avant d’obtenir cette autorité, ils l’ont visée, voulue, briguée. Ce sont des mécontents. Ils apportent au monde une liste de doléances, un plan de reconstitution.

Mais ils sont aussitôt applaudis de ce coup d’audace. Le génie et la modestie de leurs devanciers du grand siècle avaient assuré leur crédit. On commence par les prier de s’installer. On les supplie ensuite de continuer leur ouvrage de destruction réelle, de construction imaginaire. Et la vivacité, l’esprit, l’éloquence de leurs critiques leur procure la vogue. Jusqu’à quel point ? Cela doit être mesuré au degré de la tolérance dont Jean-Jacques réussit à bénéficier. Il faut se rappeler ses manières, ses goûts et toutes les tares de sa personne. Que la société la plus parfaite de l’Europe, la première ville du monde l’aient accueilli et l’aient choyé ; qu’il y ait été un homme à la mode ; qu’il y ait figuré le pouvoir spirituel de l’époque ; qu’un peuple tributaire de nos mœurs françaises, le