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appendice i

On l’a figurée comme un Lien mystérieux autour d’une gerbe, comme le Frein mis à la bouche de célestes chevaux, comme la Ligne pure cernant quelque noble effigie, comme un Ordre vivant qui distribue avec convenance chaque parcelle. Ô mélancoliques images, imparfaite allusion à la splendeur qui n’est qu’en toi ! J’arrive après les autres pour tenter de la définir. Mais j’aime mieux te dire, ô déesse, ce que j’en vois.

Qui la trouve, trouve la paix en même temps. Il s’arrête, sachant que l’au-delà ni l’en-deçà n’enferment plus rien qu’il ne tienne. L’homme vulgaire pense ; celui-ci pense bien. Les Grecs nous semblent aujourd’hui avoir bien abusé de cette fine particule qu’ils ont reçue de toi. Dis, la comprenons-nous ? Savons-nous ce que c’est que bien être, bien vivre, bien mourir, bien penser ? Sentie d’abord exactement, puis négligée, puis méconnue, la leçon de Minerve n’a cependant jamais été oubliée tout à fait ; nos pires déchéances se souviennent qu’il est des règles, des figures, pour tout dire des lois divines en vertu desquelles le bonheur se conçoit et se peut fixer la beauté.

Comme un navire qui descend sous le pli de la vague est trop bien construit pour sombrer : ta Civilisation, celle que l’on désigne entre toutes les autres quand on veut nommer l’excellente, ne s’est jamais perdue, quoiqu’on l’ait perdue quelquefois. On dit que l’homme crée un règne nouveau dans le monde : l’homme classique forme un règne dans le règne humain. Il s’étend sur le meilleur de l’œuvre romaine et française. L’Église a mis ton nom, Minerva, sur plus d’un autel ; en Italie, en Thrace, tu triomphes près de sa croix. Des coins de France gardent, eux aussi, ton vocable. La douceur de notre langage, la politesse de nos mœurs, le raffinement