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L’AVENIR DE L’INTELLIGENCE



L’ILLUSION


Un écrivain bien médiocre, mais représentatif, est devenu presque fameux pour ses crises d’enthousiasme toutes les fois qu’un membre de la République des lettres se trouve touché, mort ou vif, par les honneurs officiels. Tout lui sert de prétexte, remise de médaille, érection de statue, ou pose de plaque. Pourvu que la cérémonie ait comporté des uniformes et des habits brodés, sa joie naïve éclate en applaudissements.

— Y avez-vous pris garde ? dit-il, les yeux serrés, le chef de l’État s’était fait représenter. Nous avions la moitié du Conseil des ministres et les deux préfets. Tant de généraux ! Des régiments avec drapeau, des musiciens et leur bannière. Sans compter beaucoup de magistrats en hermine et de professeurs, ces derniers sans leur toge, ce qui est malheureux.

— Et les soldats faisaient la haie ? — Ils la faisaient.

— En armes ? — Vous l’avez dit. — Mais que disait le peuple ? — Il n’en croyait pas ses cent yeux !

« Pareille chose ne se fût jamais vue voilà six-vingt ans : des tambours, du canon et le déplacement des autorités pour un simple gratte-papier ! Jadis, un