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leur principe commun

« Les femmes que vous poursuivez d’épithètes désobligeantes, ces perverties, ces dénaturées, dites-vous, seront alors remerciées, comme de grandes bienfaitrices, comme des saintes, si l’on trouve qu’elles soient restées les gardiennes vigilantes du charme, que le génie humain ajouta à l’amour. Vivant peut-être un peu trop près l’une de l’autre, elles auront perpétué, gardé et défendu l’arcane, bien loin de l’avoir déchiré. L’Inconnu féminin continuera, par elles, d’exalter les poètes et les philosophes d’amour. Beatrice in suso ed io in lèi guardava ! Le citoyen des hautes civilisations ne se lassera point, quoi que prétende Nietzsche, de presser de questions le cœur énigmatique, formé de chair comme son cœur, mais vaste, obscur, étincelant comme l’arche du ciel nocturne. On aliène, on perd ce mystère. On le retrouvera dans la poitrine des Ménades. L’homme les mettra sur l’autel. À supposer qu’il soit ingrat, n’en auront-elles pas moins été bienfaitrices ? Le monde leur devra le trésor secret de l’Amour… »

Ingénieuses prophéties qui ne sont pas vérifiées.

Bien loin de préserver la source de la vie féminine, cet entraînement régulier aux outrances du sentiment la dissipe et la brûle en vain, et ce sont les plus tendres et les plus naturelles qui en souffrent les premières, justement dans la qualité de cet amour dont elles tirent leur fierté. La sensibilité surmenée ne peut que déchoir.

Car la pente est fatale. Une conscience trop attentive à la vie du cœur précise et colore à l’excès le