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le romantisme féminin

vais, mais « avec franchise » vous-même. La personnalité sincère, tout est là !

Voilà donc le système. Mlle  Renée Vivien, dans son art et dans sa morale, s’y jette à corps perdu. Elle a dessiné son jardin avec le seul souci de n’y rien mettre que de sien et, depuis la statue de l’Excentricité jusqu’à celle du Mal, ni les images de la mort, de la décrépitude et de la maladie, ni les sensations des voluptés les plus douloureuses ne l’ont découragée. Mme  Mardrus, moins tragique, non moins méthodique, s’appliquait, dans ses vers de jeune fille, à faire valoir ce qui définissait et isolait son être. Le même accent de confession reparaît, mais beaucoup plus âpre, dans la Nouvelle Espérance. Un prêtre catholique pourrait l’interpréter sans invraisemblance comme la nostalgie des sacrements. Cette âme, dirait-il, ne s’offrirait pas aussi nue sans l’obscur sentiment qu’avouer c’est se racheter, souffrir c’est expier et pleurer c’est se repentir. Mais je ne trouve nulle trace d’expiation ni de repentir dans ce livre. Le désespoir en est très pur : sans horizon, ni perspective, il aboutit droit à la mort. Pas une phrase, pas un mot qui fasse soupçonner la moindre confiance en un juge surnaturel ni dans quelque amitié céleste. Pour tout Dieu, Sabine de Fontenay a son amant, ou plutôt son amour, ou plutôt elle-même, ou plutôt une étincelante minute d’intensité et de frénésie pour son moi. La sensibilité saturée aspire à finir. Elle a atteint le bord du cercle qui l’environne, tout ce qui peut s’éprouver du monde est souffert et goûté. Bulle écu-