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le romantisme féminin

mais surtout, semble-t-il, Rimbaud, Laforgue, Maeterlinck, Verlaine, Kahn et Mallarmé. Il est d’ailleurs possible qu’elle n’eût jamais ouvert aucun de ces différents écrivains jusqu’à telle ou telle date précise à laquelle son art se trouvait déjà au complet. Mais cela ne signifie rien. Il y a du Rimbaud, du Laforgue, du Mallarmé et du Maeterlinck, quoique latent et en puissance, tant chez Victor Hugo que chez François Coppée. Il y a du Laforgue, du Rimbaud, du Kahn et du Verlaine, diffus et dilué, parfois accentué, dans les poèmes réguliers d’Albert Samain, de Rodenbach, de M. Jean Lorrain, de M. André Gide et de quantité d’autres versificateurs ou poètes contemporains, qui se rencontrent au hasard du journal ou de la revue. Quand on s’oublie à prononcer les noms de ces « artistes littéraires[1] », à propos des lectures du très jeune auteur d’Occident, on doit entendre que cette âme curieuse et cet esprit hâtif se pénétraient avec une ardeur particulière de tout ce qui flottait de mallarméen et de rimbaldique, de maeterlinkiste et de laforguien.

Elle croissait dans ce tourbillon de fumées un peu lentes, veillant sur ses complications, attentive à ne rien exprimer que d’énigmatique et de personnel, en un mot cultivant l’idiosyncrasie comme un pot de fleurs. Mais, née imaginative, beaucoup plus imaginative que sensible et que passionnée, son goût du bizarre ne s’exerçait, en définitive, que sur les formes qu’elle trouvait dans son esprit : les mots, les ima-

  1. L’expression est de M. Maurice Spronck, les Artistes littéraires (Paris, Calmann-Lévy, 1890).