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préface de la deuxième édition

et moral de chacun des Français vivants, nos contemporains : ils sont menacés dans leurs biens et dans leur vie. Un patriotisme lucide revêt donc naturellement les formes les plus hautes de la pitié. Comment ne pas s’apitoyer sur la destinée de générations florissantes conduites par l’ignorance, l’amnésie et l’aveuglement de l’État aux « cavernes de mort » de la plus sombre et la plus cruelle des boucheries ? Juste pitié qui se tranforme bientôt en colère quand on découvre dans le monde officiel et officieux un effort insolent pour nier le mal et le justifier.

.« Ce qui frappe », écrit un théoricien républicain qui en résume quantité d’autres[1], « ce qui frappe le plus dans la doctriné royaliste, c’est l’édifice sur lequel elle repose » : l’idée « du salut public ». Cette idée nous « hypnotise ». Elle nous « inspire une véritable phobie » : « dans cette disposition d’esprit, les inconvénients secondaires, les accidents fortuits, les défaillances individuelles du régime »« prennent une importance considérable, et leurs conséquences sont immédiatement généralisées ». Le royaliste montre « un noir pessimisme à l’encontre du présent », « les événements sont interprétés comme autant de marques de décadence ». « En réalité, la patrie n’est pas en danger, et sa sauvegarde ne réclame aucune mesure de salut public ». — « À l’extérieur, aucun

  1. M. Léon Jacques, docteur en droit, Les Partis politiques sous la IIIe République, pp. 186 et suiv.