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un gouvernement inhumain

venues à supprimer les occasions de mettre en avant un nom d’homme pour caractériser et signifier une politique. Eh bien, même en ce cas, la responsabilité demeure fictive : à chaque instant, à chaque pas, il se produit un phénomène d’amnistie. Non l’amnistie légale, mais, bien plus forte et plus dangereuse encore, une amnistie physique et fatale, une amnésie tenant à l’absence de tout souvenir, je dis à l’absence d’un organe central qui fasse fonction de cerveau et introduise quelque rudiment de liaison et d’unité dans la suite des vicissitudes courantes.

C’est ainsi qu’un pauvre complaisant du régime a pu écrire que le « parlementarisme conserve ». Il conserve ses hommes à force de leur verser à flots ces eaux lustrales de l’oubli. Il conserve, mais quels déchets ! Un Rouvier, un Brisson, ont pu survivre au Panama, et, au bout de quelques saisons d’une plongée plus ou moins discrète, reparaître, frais comme rose, à la surface de l’élément. Un Joseph Reinach, une première fois recouvert par les sales boues du même scandale, a réparu aussi par la faveur de la campagne qu’il mena pour l’amour de son congénère le traître juif Alfred Dreyfus. Du moins pouvait-on croire, après la honte judiciaire et militaire de 1906, que, malgré tant de crimes impunis, Joseph Reinach mourrait en portant sur le front quelque stigmate ineffaçable des neuf années de subversion et de trahison dans lesquelles il avait présidé à la répartition des mensualités du Syndicat fameux