Page:Maurras - Kiel et Tanger - 1914.djvu/308

Cette page n’a pas encore été corrigée
186
kiel et tanger

cière, et nos entrepreneurs publics à Tanger et à Fez voulant sauver l’argent, à défaut de l’honneur. Mais ces raisons n’auraient pas été décisives si l’on n’eût observé en outre que M. Rouvier n’appartient pas à la tribu des jeunes ministres, ni roses, ni teintés ; il n’est pas radical, il n’est pas progressiste : il est « opportuniste ». Il est de la bande de Grévy et de Gambetta, il appartient à la promotion de ce héros d’Anatole France qui savait si bien dire que nous n’avons pas, que nous ne pouvons pas avoir de politique étrangère, et qui savait pourquoi et qui savait comment[1]. M. Rouvier avait été des plus fougueux à s’élever contre l’hurluberlu qui voulait faire de « la grande politique[2] », M. Rouvier se déclara pour la petite, très nettement. Il liquida l’affaire de Tanger et, tout en la liquidant, il se donna pour but de reprendre l’ancien système ou plutôt cette ancienne absence de système qui est positivement chère à quiconque, oubliant les sentiments et les intérêts d’une France, prend en main les nécessités d’une République anarchique.

Le nouveau ministre des Affaires étrangères n’était déjà plus seul dans son sentiment ; il se fit rapidement écouter parmi de plus jeunes que lui. Il convertit à son point de vue les esprits capables d’entendre les leçons de l’expérience. Notamment M. Pierre Baudin, homme avisé, opi-

  1. Voîr l’Histoire contemporaine de Anatole France.
  2. L’expression est de M. Ranc, autre Gambettiste authentique.