heures décisives de l’affaire Dreyfus, M. Delcassé, que l’on donne pour le champion du monde contre l’Allemagne, avait veillé au bon renom des attachés militaires allemands.
Cette complaisance, qu’on peut nommer d’un mot, s’accorde mal avec les beaux rêves nationalistes[1], les projets de fière revanche et tous les autres bons sentiments que, depuis sa chute, on lui prête. Certains actes excluent certaines intentions. Les bons offices rendus par M. Delcassé au gouvernement de Schwartzkoppen et de Munster établissent qu’il n’était pas étouffé par le scrupule. Il faut plutôt se souvenir qu’il a multiplié les démarches amicales auprès de l’Allemagne toutes les fois que la suggestion anglaise l’y a porté. Il les a cessées et remplacées par des démar-
- ↑ C’est après coup (après le coup que lui donna sa chute)
que M. Delcassé se voulut faire peindre en libérateur de
l’Alsace-Lorraine. Il a même donné la première touche au
portrait. Drumont (Libre Parole du 31 janvier 1906) rapporte
comme textuelles ces paroles que l’ancien ministre
a dites à des représentants nationalistes :
« J’oublie les attaques de la Libre Parole depuis dix ans, j’oublie tout ce qui a pu être dit contre moi, je ne me souviens que de ce que M. Drumont a écrit : « Depuis trente-cinq ans, Delcassé est le seul ministre des Affaires étrangères qui ait osé regarder l’Allemagne en face… » Je serai fier de montrer ces quelques lignes à mes enfants plus tard. » Ces belles paroles ne peuvent faire oublier comment M. Delcassé a fait défendre sa politique par ses journaux, ses amis, son parti.
« Elle n’est pas dominée par l’idée de revanche. » — « Le but qu’il poursuivait n’était pas la revanche », répète M. Maurice Sarraut (un des hommes les plus influents du groupe Delcassé) dans l’Humanité au 22 octobre 1905. Et c’est la simple vérité.