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le précédent nous engageait

passionnait notre public, il était trop facile à l’Allemagne de causer de gros embarras à nos cabinets dreyfusiens par la simple menace de ses divulgations[1]. Elle les tenait d’assez court. Tout cela fit un grand retard dans le projet de coalition sur lequel l’Angleterre nous faisait sonder.

L’Angleterre avait dû attendre et patienter. Son organisation politique parfaite, qui laissait à un roi plein d’expérience une autorité plénière sur les affaires de l’État, lui donnait le moyen de ne rien brusquer ni improviser. Son dessein se fondait sur le sentiment d’une nécessité naturelle. Il était difficile que le Gouvernement français lui échappât. Du seul fait que le plan Hanotaux s’effaçait, l’amour-propre et la vanité des gouvernants, l’intérêt de parti, la badauderie du public lui-même, conspiraient à faire adopter un nouveau plan, quel qu’il pût être. La troisième République se trouvait, pour ainsi dire, embarquée. Son premier navire faisant eau, et s’enfonçant depuis Fachoda, il avait bien fallu poser le pied sur un autre, n’aurait-elle voulu que revenir droit au port ; mais le roi d’Angleterre se promettait d’entraîner sa passagère très avant dans la haute mer.

  1. Il est à remarquer que la deuxième révision du procès Dreyfus, commencée en 1903, poursuivie pendant toute la durés fe 1904, a été complètement étouffée durant l’année 1905, c’est-à-dire pendant la crise franco-allemande et n’a recommencé à faire parler d’elle qu’après la clôture de la conférence d’Algésiras, et nos élections de 1906…