unique avertisseur et contrôleur des démocraties, eut longuement et cruellement fonctionné, le pays finit par l’entendre et le faire entendre au pouvoir. On rouvrit donc le vieux « conservatoire de tous les abus », et l’on revint, par les deux lentes étapes[1] de MM. Thomson et Picard, au ministère d’un amiral. Mais l’expérience avait coûté cher : du deuxième rang que nous tenions en 1899, nous tombions, en 1909, au cinquième : la marine française s’est classée au-dessous des marines de l’Allemagne, des États-Unis, même du Japon.
Le résultat n’était pas évitable. Mais un autre malheur est au bout du système contraire auquel on semble devoir se ranger. Affranchie des fous furieux du Parlement, la marine retombe sous le particularisme de ses bureaux. Dès qu’un grand pouvoir ne s’élève plus au-dessus des administrations, ces puissances subalternes, mais compétentes, doivent s’ériger en petites souverainetés indépen-
- ↑ Combien ces étapes ont été lentes, on peut s’en faire
une idée par des chiffres recueillis dans un grand organe
officieux du gouvernement républicain, le Temps. Les trois
années 1907, 1908 et 1909, celles qui ont vu éclater les
conséquences du système Lanessan-Pelletan, et se vérifier,
à coups de sinistres, tous les pronostics les plus sombres,
ont vu périr ou mettre hors d’usage un certain nombre
de nos unités de guerre maritime. Combien en a-t-on reconstruit ?
Voici les mises en chantier en Allemagne et en France :
france allemagne Cuirassés0 10 Croiseurs cuirassés0 3 Croiseurs protégés0 6 Contre-torpilleurs17 36 Sous-marins0 8