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claux, les Grimaux, les Saussine et les Boutroux, à leurs prototypes révolutionnaires de 1789, 1848 ou 1871.

M. Jules Méline, M. Gabriel Hanotaux et M. Félix Faure avaient donc bien mal calculé la résistance de ce banc de nuage sur lequel ils s’étaient ridiculement installés ! L’opinion change : c’est sa nature dont ils ne se méfiaient pas. Elle a suffi à les renverser.

Sur les causes de cette révolution de l’esprit public, M. de Freycinet disait au Conseil de guerre de Rennes que la campagne Dreyfus avait été « très désintéressée en France » (il en était « sûr »), mais qu’elle « l’était peut-être un peu moins à l’Étranger ». Ce témoin, le plus indulgent des hommes, n’avait pu fermer les yeux à l’évidence de l’intérêt majeur qu’avaient telle et telle puissance à diminuer la cohésion et le prestige de notre organisation militaire. Mais, plus encore que l’Armée, les amis de Dreyfus affaiblissaient l’État ; ils opposaient à toute politique générale un conflit intérieur qui paralysait. L’immobilité ainsi obtenue servait si clairement les intérêts de l’Angleterre qu’on ne peut supposer qu’elle y soit demeurée étrangère. La politique anglaise a toujours profité du jeu des factions parmi nous. Il est aussi de règle qu’elle les suscite et les paye. Son intervention était naturelle et d’ailleurs presque juste. C’était la riposte indiquée au plan Hanotaux, mais appliquée par un gouvernement traditionnel au point faible