Page:Maurras - Kiel et Tanger - 1914.djvu/146

Cette page n’a pas encore été corrigée
24
kiel et tanger

volontés et d’autres idées que d’aller parader dans un hémicycle.

Ce qui fut appelé mégalomanie chez M. Hanotaux, comme plus tard chez son successeur, n’était que rêve de l’action. Oui, remplir son mérite, servir son pays, cueillir ces fruits de gloire qui, pour un esprit neuf et, comme celui-ci, bien placé par les circonstances, deviennent aisément le seul digne objet de désir ! Neveu de l’historien patriote et révolutionnaire Henri Martin, l’homme d’État devait se dire qu’il serait beau d’avoir surgi enfin dans cette jeune République pour lui apprendre à se mouvoir entre les nations.

Elle avait vécu jusque-là d’une existence repliée et végétative, « à peine plus puissante », « mais moins honorée que la République helvétique ». C’était exactement le sort que lui avait prédit Renan. Eh bien ! on lui rendrait la vie supérieure et la figure humaine. L’étonnement de M. Hanotaux et de ses amis était qu’on ne l’eût pas essayé plus tôt. — Quelle erreur ! était-il de mode de se dire en 1895, quelle erreur que cette inertie !… Il semblait véritablement que ce fût erreur. Des nouveautés brillantes, vives, conformes à la tradition du pays, flattaient le regard, et l’espérance s’enhardissait. On choisissait de beaux ambassadeurs titrés, armoriés, dorés sur toutes les tranches. Amiraux, généraux, étaient mobilisés pour des missions d’État. Les cardinaux et les évêques attendaient leur tour, qui semblait imminent, au fur et à mesure que les organes du