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anthinéa

Βέλτιστε (Béltisté), répondais-je, cœur excellent, il me sera toujours impossible de vivre ici un mois, un jour ou seulement une heure de plus que je n’y aurai vécu en effet. Comment faire l’expérience à laquelle vous m’engagez ?

S’il insistait, je l’emmenais en quelque beau lieu que, depuis vingt mois de séjour, il n’avait pas encore eu la tentation d’explorer. C’est ainsi que je lui fis connaître le Céramique.

Un second s’évertuait à me démontrer qu’il n’y avait rien où je venais de voir quelque chose, presque rien où j’avais trouvé infiniment, et qu’enfin je ne m’amusais point là même où ma passion m’enfonçait des heures entières.

— On voit bien que vous êtes en vacances, me répétait non sans aigreur ce fonctionnaire. Et je n’osais lui répliquer que l’on voyait de reste qu’il était en fonction.

Un voyageur de profession, fier d’avoir aperçu un grand nombre de pagodes et de mosquées :

— Vous avez, disait-il, un esprit tout atrophié et une tête rétrécie par l’éducation classique.

— Eh ! lui répliquais-je en moi-même, l’éducation romantique n’aurait-elle point embrouillé et désorganisé ce que vous aviez de cervelle ?

» Admettons que, de nous, ce soit moi qui fasse l’erreur. Mais l’erreur est précieuse, si elle me met en état de comprendre et de ressentir ce que l’histoire intellectuelle de l’univers nous présente