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anthinéa

J’étais tout occupé de cette sagesse d’Homère quand parut l’archipel admirable des Lipari, qui sont le royaume d’Eole enfin fixé. D’abord, sur la droite, deux terres, Alicudi et Filicudi, ont émergé, l’une après l’autre, la dernière flanquée d’un îlot de rocher abrupt ; puis une troisième île, la plus belle de ceHes qui se montrent de ce côté, Salina, formée de deux mamelons si gracieusement accouplés que l’œil ne se peut détaeher de la courbe souple qui joint les cimes. Un hameau, composé de quelques douzaines de petites maisons semées en un charmant désordre, descend de la double colline et semble glisser à la mer au milieu d’un bocage dont la verdure est toute sombre.

Comme nous cinglons au sud-est dans la direction de Messine, Alicudi, Filicudi et Salina sont laissées sur la droite ; mais, à gauche, le Stromboli fumeux est apparu depuis longtemps ; sa notoriété lui vaut un grand succès parmi mes compagnons de route. On nous vante l’effet de sa fumée rouge et de sa flamme étincelante quand on navigue ici dans la nuit ; on ajoute que, par les jours clairs, sur un ciel bleu, cette fumée opaque fait une tache curieuse. « Et je le crois, puisque je ne le vois pas. » Par malheur, il ne fait pas nuit, il fait même plein jour ; mais c’est un petit jour grisâtre, le panache du Stromboli ne semble qu’un nuage de plus parmi ceux qui traînent au ciel.