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II
préface

La parenté des caractères me fil souvenir aussitôt d’une étymologie qui a été proposée en Allemagne pour le nom de la ville et de la déesse athénienne. Athènes nous serait venue d’anthinea[1], qui veut dire fleurie ; Athènes à l’origine dirait en grec ce que dit Florence en latin. Congédions les philologues : les uns veulent qu’Athènes ait signifié la déesse qui n’a pas été en nourrice, étant née grande fille de la tête de Jupiter ; les autres la dérivent d’un vocable albanais qui veut dire figuier. Ni vérité ni fable ne valent contre anthinea. Une tige mystique unit les deux chefs-d’œuvre de la Grèce et de la Toscane. Je ne saurais penser Florence sans souvenir d’Athènes, moderne et barbare sans doute, mais encore capable de soutenir un si beau nom.

Une anthinea[2], fleur du monde, printemps des pensées et des arts, s’élargit nécessairement et nous désigne d’autres lieux qu’Athènes et que Florence. Elle me fit songer tout d’abord à écrire un traité de la conformité du Valois et du Parisis avec l’Attique la plus pure. Aucune terre n’est mieux prise dans l’enceinte d’anthinea que la douce et nerveuse patrie d’un Jean Racine, d’un Voltaire, d’un La Fontaine. Le difficile était de faire sentir comme je le sens le rapport de ce territoire avec nos terrains brûlés du

  1. Voir la note i à la fin du livre.
  2. Le XVIIe siècle aurait dit anthinée. Notre langue n’a pas retrouvé encore l’audace et le pouvoir de l’assimilation.