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les fétiches et les images sacrées : nos Picards n’aiment pas changer leurs habitudes. »

Ils dépassèrent quelques constructions isolées et neuves qui jalonnaient un quartier nouveau, puis longèrent une vieille rue tortueuse aux maisons de bois ventrues. Sur le pas des portes les marchandes bavardes avaient le nez robuste et les grosses joues des bonnes femmes sculptées jadis sur les têtes de poutres de leurs maisons.

« Ici, dit Bertrand d’Ouville, les bourgeois sont plus nobles que les nobles. Certains commerces ont été exercés par la même famille depuis le douzième siècle. Vous serez certainement frappé par la dignité de nos boutiquiers. Ils sont polis, mais nullement obséquieux. Si vous désirez un objet qu’ils n’ont point, ne leur demandez pas de le faire venir de Paris, ils vous diront de l’aller chercher vous-même. S’ils le possèdent, c’est à vous de le découvrir dans le magasin.