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chasses et voyages au congo

dans cette poursuite, car nous n’aurions jamais dû nous risquer dans un pareil terrain à la recherche d’une bête blessée qui d’un moment à l’autre pouvait surgir devant nous et nous attaquer ; elle avait été couchée à différentes reprises et tout le monde sait que la rencontre avec un buffle blessé est toujours dangereuse et très souvent mortelle. Le capitaine B. qui nous avait entraînés dans cette aventure, en connaissait certainement les risques en vieux chasseur professionnel qu’il était, mais ma femme et moi, nous nous sommes dit après coup, qu’il avait voulu nous éprouver, et voir jusqu’à quel point nous n’avions pas peur de nous mesurer avec les bêtes sauvages… Inutile d’ajouter que les noirs qui nous accompagnaient, avaient fui à la première alerte, et qu’ils ne reparurent que lorsque tout danger fut écarté.

Le soir du même jour je pris la pirogue et je partis en voyage de reconnaissance vers la pointe de la presqu’île. Ayant doublé le promontoire je débarquai de l’autre côté, et me mis en chasse. Je vis une femelle de bongo (bush-buck) rouge à lignes blanches, mais elle ne se laissa pas approcher ; puis j’aperçus un troupeau de singes de la taille des totas abyssins, gris comme des marmottes avec une longue queue, une collerette et des favoris jaune serin et du rouge dans la figure ; je tirai et je manquai, n’ayant pas mon fusil à plomb et le tir à balle sur ces petites bêtes remuantes étant très difficile. — Je ne vis rien d’autre de ce côté de la presqu’île et me rembarquai d’assez méchante humeur parce que d’abord comme toujours les indigènes, vers la tombée du soir, hâtaient le retour, voulant être rentrés avant la nuit, et ensuite ma chasse avait été gênée par l’un des rameurs qui, enfreignant les ordres reçus, était descendu à terre allant se promener dans la montagne où il avait dérangé le gibier. Pour sa désobéissance je le fis gifler par le policeman noir qui m’accompagnait, et celui-ci de même que le fustigé me saluèrent ensuite en portant la main à la française, car le nègre n’a vraiment de respect