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chasses et voyages au congo

chauffer au soleil devant sa hutte, est-il un spectacle ordinaire d’un bout à l’autre de l’Afrique.

La venue du blanc qui a « changé cet ordre de choses, a par conséquent été très mal vue par toute la population mâle, et s’il est des exceptions comme celle de ce vieux chef noir du Lomami qui, instruit en Belgique, est déjà du temps de Léopold II devenu administrateur territorial, qui a obtenu une concession de 700 hectares sur laquelle il cultive actuellement café, cacao et palmistes, et qui envoie ses fils à l’école de Liège, — cette exception confirme la règle, et en général le noir n’a qu’un désir, c’est de voir repartir le blanc au plus vite, après quoi il redeviendra aussi heureux qu’avant son arrivée. On comprendra aisément qu’avec une mentalité pareille, les travailleurs de couleur qu’on recrute et que l’on embauche quasi contre leur gré, ne fournissent pas une main-d’œuvre de première classe, et par leur apathie et leur paresse, ils espèrent dégoûter le blanc et l’inciter à s’en aller.

Il y a enfin la question des chefferies qui continuent à jouer un rôle très important dans la Colonie, car si en principe on a supprimé les, chefs de clans ou de tribus en ne leur laissant qu’un rôle représentatif et la médaille (à langue bilingue) qu’ils sont très fiers d’arborer à toutes les occasions officielles, en réalité ils demeurent les directeurs occultes, et les nègres continuent à leur obéir en secret, car ils tiennent très soigneusement caché tout de ce qui se passe chez eux. L’indigène est resté imbu des idées de chefferies, et y demeure attaché, quoiqu’on puisse faire.

Telles sont en résumé, et dans leurs grands traits, les principales causes de la dépression quasi-unanime de tous les colons qui avec nous regagnent la mère-patrie et après avoir vu l’enthousiasme des néophytes du Kivu, et les très belles réalisations accomplies dans toute la Province Orientale, il est pénible de sentir au retour, qu’il y a ici « quelque chose qui ne va plus ».