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chasses et voyages au congo

vrait peut-être s’en servir, mais heureusement cela n’a pas été nécessaire, et nous en avons été quittes pour la peur…

Quand nous avons été un peu remis de notre émotion, nous nous sommes mis à la recherche du blessé, et l’avons également trouvé couché mort derrière un buisson, à trois cents mètres plus loin. Après que nous avons eu fini de photographier et d’admirer ces magnifiques dépouilles qui avaient bien failli nous coûter la vie, le soleil était déjà bas sur l’horizon, et il ne fallait pas songer à, pouvoir les rapporter au village ce jour-là. Il a donc été décidé que nous laisserions derrière nous l’un des pisteurs auquel on adjoindrait deux hommes de nos tippoyes, armés de lances, pour les garder et faire du feu pour tenir les fauves en respect ; j’ai dû tirer à la courte paille celui qui resterait, car la perspective de passer une nuit à la belle étoile ne leur souriait guère, malgré l’appât de la viande qui le lendemain leur échoirait en partage. Et à la tombée de la nuit, nous sommes rentrés triomphalement au village, où Badia, mystérieusement prévenu, était venu à notre rencontre pour nous féliciter.

Le lendemain de ce jour mémorable fut entièrement employé à dépouiller les victimes et à rapporter au village les quartiers de viande pour les indigènes, la peau et les cornes pour moi-même ; vers le soir nous vîmes revenir tous les porteurs de la caravane ployant sous le poids des morceaux que chacun d’eux s’était adjugé, le prenant naturellement le plus gros possible, et la nuit suivante se passa en une ripaille monstre dont les effluves ne manquèrent pas de nous empester copieusement. Pour éviter d’être pour suivis par cette odeur nauséabonde pendant tout le temps que doit durer notre voyage de retour, nous laissons derrière nous, l’un des pisteurs et quelques hommes qui sont chargés de rapporter les dépouilles directement à Faradje, pendant que nous ferons encore un petit crochet du côté de la montagne où, paraît-il, d’autres espèces de gibier abondent.