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chasses et voyages au congo

lation féminine offre sans pudeur à nos regards toute la gamme des seins les plus variés, depuis le bouton naissant de la fillette, jusqu’aux mamelles pendantes des matrones déformées. « Petits fripons, grands pendards », comme disait Voltaire avec son sourire sarcastique ; une loque ceignant les reins, sert de cache-sexe, tout comme en Europe les étoffes légères le cachent aussi ; les enfants sont pour la plupart ventrus et beaucoup ont la déformation du nombril, provenant du manque de soins au moment de la naissance.

Aussitôt que notre pneu est réparé, nous nous remettons en route, et pendant des heures encore nous parcourons la grande forêt monotone : pas une bête n’est visible, pas même le moindre singe ne vient égayer de ses ébats la solitude de ces lieux ; seuls de place en place, les troncs sciés à quatre ou cinq mètres du sol font un effet des plus curieux et donnent à penser que la main de l’homme a passé par ici.

Le temps est lourd et couvert, et le roulement de l’auto vous berçant, on est tout près de s’assoupir, quand tout il coup un obstacle imprévu nous arrête et nous empêche de continuer notre chemin ; cette nuit un coup de vent a renversé un arbre monstre qui est tombé en travers de la route et barre le passage. Inutile de compter sur le secours des Ponts et Chaussées pour nous aider à déblayer la voie ; bon gré, mal gré il faudra que nous voyions par nos propres moyens à nous tirer d’embarras. Et comme il ne faut pas songer à faire bouger la masse que nous avons devant nous, qui même en étant sciée en deux tronçons ne livrerait pas passage à l’auto, nous décidons qu’il n’y a qu’une chose à faire, c’est de nous frayer un nouveau chemin à côté de l’ancien. Une autre auto, venant en sens inverse, est aux prises avec les mêmes difficultés que nous, et ensemble nous recourons aux indigènes qui un à un ont surgi comme par miracle du sol et qui consentent après un bon nombre de palabres à tracer dans la forêt une nouvelle piste pour