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chasses et voyages au congo

disparaît dans le fourré avec le’reste du troupeau. Nous ne pouvons songer à prendre la poursuite, car entre temps la nuit est arrivée et il faudra remettre à demain et de ramener la dépouille du mort et de rechercher le blessé. Le retour au camp fut des plus pittoresques ; nous avions dû allumer des torches pour nous guider, car l’obscurité était complète et cette retraite aux flambeaux au passage de la rivière fut réellement magnifique. Tel un souverain rentrant dans son palais un soir d’illumination, nous avons passé l’eau entre une double haie d’hippos rangés à droite et à gauche comme des laquais bien stylés, et la lumière de nos fanaux qui se reflétait mille fois dans l’eau, donnait à toute cette scène l’aspect d’un conte de fées.

Dès l’aube le lendemain nous repassons la rivière, ma femme et moi, pour aller retrouver nos buffles de la veille, le mort est toujours là, et l’hyène nocturne ne s’est attaquée qu’à ses entrailles laissant le reste de la bête intact. Après en avoir pris la photographie, et laissant derrière nous le nombre d’hommes nécessaires pour la dépiauter, nous nous sommes engagés dans le fourré pour tâcher de retrouver le blessé de la veille, mais les traces de sang nombreuses au début s’espaçaient peu à peu, pour finir bientôt par disparaître entièrement et il nous fallut renoncer à tout espoir de poursuite ; un moment nous eûmes une grosse émotion, les traces menaient vers une espèce de petit marais, et dans celui-ci une énorme masse grise était couchée ; le temps d’épauler ma carabine et de tirer et la masse grise se mettait en marche immédiatement, mais pas assez vite pourtant pour que nous n’ayons eu le temps de reconnaître, à notre grande stupéfaction, que nous venions de déranger un hippo de belle taille, que malgré tout le sang qu’il perdait, nous ne sommes pas arrivés à rejoindre et qui aura été crever quelque part dans la rivière. Après toutes ces poursuites manquées, il ne nous reste plus qu’à revenir au camp et à songer au retour, car le temps que nous voulions consacrer à cette partie de la Réserve