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les aveugles

La jeune Aveugle.

Il voit ! il voit ! Il faut qu’il voie quelque chose puisqu’il pleure ! Elle saisit l’enfant dans ses bras et s’avance dans la direction d’où semble venir le bruit des pas ; les autres femmes la suivent anxieusement et l’entourent. Je vais à sa rencontre !

Le plus vieil Aveugle.

Prenez garde !

La jeune Aveugle.

Oh ! comme il pleure ! — Qu’y a-t-il ! — Ne pleure pas. — N’aie pas peur ; il n’y a rien à craindre, nous sommes ici ; nous sommes autour de toi. — Que vois-tu ? — Ne crains rien. — Ne pleure pas ainsi ! — Que vois-tu ! — Dis, que vois-tu ?

La plus vieille Aveugle.

Le bruit des pas se rapproche par ici ; écoutez donc ! écoutez donc !

Le plus vieil Aveugle.

J’entends le frôlement d’une robe contre les feuilles mortes.

La sixième Aveugle.

Est-ce une femme ?

Le plus vieil Aveugle.

Est-ce que c’est un bruit de pas ?

Premier Aveugle-né.

C’est peut-être la mer dans les feuilles mortes ?