l’obliger d’accomplir malgré elle, ou du moins à son insu, son office matrimonial ? Voici le merveilleux piège d’amour imaginé par la Sauge : tout au fond de sa tente de soie violette, elle distille quelques gouttes de nectar ; c’est l’appât. Mais, barrant l’accès du liquide sucré, se dressent deux tiges parallèles, assez semblables aux arbres pivotants d’un pont-levis hollandais. Tout en haut de chaque tige se trouve une grosse ampoule, l’anthère, qui déborde de pollen ; en bas, deux ampoules plus petites servent de contrepoids. Quand l’abeille pénètre dans la fleur, pour atteindre le nectar, elle doit pousser de la tête les petites ampoules. Les deux tiges, qui pivotent sur un axe, basculent aussitôt, et les anthères supérieures viennent toucher les flancs de l’insecte qu’ils couvrent de poussière fécondante.
Aussitôt l’abeille sortie, les pivots formant ressorts ramènent le mécanisme à sa position primitive, et tout est prêt à fonctionner lors d’une nouvelle visite.