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L’IMMORTALITÉ

Il ne nous paraît même pas possible de nous demander si quelque chose de la vie déjà spirituelle que nous avons aimée en lui subsiste ailleurs que dans notre souvenir, et s’il existe un autre monde pour les chiens. Il nous semblerait assez ridicule que le temps et l’espace conservassent précieusement, durant l’éternité, parmi les astres et dans les palais sans bornes de l’éther, l’âme d’un pauvre animal, faite de cinq ou six habitudes touchantes mais bien naïves, et du désir de boire, de manger, de dormir au chaud et de saluer ses pareils de la manière que l’on sait. Que resterait-il d’ailleurs de cette âme formée tout entière de quelques besoins d’un corps rudimentaire, lorsque ce corps ne serait plus ? Mais de quel droit imaginons-nous, entre nous et l’animal, un abîme qui n’existe même pas du minéral au végétal, du végétal à l’animal ? C’est de droit à nous croire si loin, si différent de tout ce qui vit sur la terre : c’est cette prétention à nous mettre dans une catégorie