Page:Maurice Maeterlinck - L'intelligence des fleurs, 1922.djvu/304

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
292
L’IMMORTALITÉ

enfermée tout entière en notre infime conscience actuelle ? Et voyez comme en tout ceci nous obéissons aux caprices illogiques de celle qu’on appelait autrefois la « folle du logis ». Qui de nous, s’il s’endormait ce soir, avec la certitude scientifique et expérimentale de se réveiller dans cent ans, tel qu’il est aujourd’hui et dans son corps intact, même à la condition de perdre tout souvenir de sa vie antérieure (ces souvenirs ne seraient-ils pas inutiles ?), qui de nous n’accueillerait ce sommeil séculaire avec la même confiance que le doux et bref sommeil de chaque nuit ? Loin de la redouter, beaucoup n’accourraient-ils pas à cette épreuve avec une curiosité empressée ? Ne verrait-on pas bien des hommes assaillir de leurs prières le dispensateur du sommeil féerique et implorer comme une grâce ce qu’ils croiraient un miraculeux prolongement de leur vie ? Pourtant, durant ce sommeil, que resterait-il, et à leur réveil, que retrouveraient-ils d’eux-mêmes ? Quel lien, au moment où ils ferment