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L’IMMORTALITÉ

III

Il n’importe ; ce moi, si incertain, si insaisissable, si fugitif et si précaire, est tellement le centre de notre être, nous intéresse si exclusivement, que toutes les réalités de notre vie s’effacent devant ce fantôme. Il nous est absolument indifférent que durant l’éternité, notre corps ou sa substance connaisse tous les bonheurs et toutes les gloires, subisse les transformations les plus magnifiques et les plus délicieuses, devienne fleur, parfum, beauté, lumière, éther, étoile : il nous est pareillement indifférent que notre intelligence s’épanouisse jusqu’à se mêler à la vie des mondes, à la comprendre et à la dominer. Notre instinct est persuadé que tout cela ne nous touchera pas, ne nous fera aucun plaisir, ne nous arrivera pas à nous-mêmes, à moins que cette mémoire de quel-