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L’ACCIDENT

hommes le bannissent à de telles profondeurs, lui permettent si rarement de revoir un rayon de soleil, le perdent si totalement de vue, l’humilient si cruellement, le garrottent si étroitement que, dans l’affolement de l’urgence, ils ne savent plus où le trouver. Ils n’ont plus, matériellement, le temps de le prévenir ou de le délivrer au fond des oubliettes où ils l’ont enchaîné, et quand il monte enfin à la rescousse, plein de bonne volonté, ses outils à la main, le mal est fait, il est trop tard, la mort vient d’accomplir son œuvre.

Ces inégalités de l’instinct, qui tiennent plutôt, je suppose, à la promptitude de l’appel qu’à la qualité du secours, se manifestent dans tous les accidents. Mettez deux automobilistes en deux dangers parallèles, inéluctables et exactement identiques, un coup de volant inexplicable, on ne sait quel bond, quelle torsion, quel détour, quelle immobilité, quel prestige sauvera l’un, pendant que l’autre ira normalement et