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LES DIEUX DE LA GUERRE

À quelles puissances avons-nous donc livré nos privilèges spécifiques ? — Je fais parfois ce rêve que l’un de nous soit doué d’un œil qui saisisse tout ce qui évolue autour de nous, tout ce qui peuple ces clartés où flottent nos regards et que nous croyons transparentes et vides, comme l’aveugle — si d’autres sens ne le détrompaient point — croirait vides les ténèbres qui enserrent son front. Imaginons qu’il perce le tain de cette sphère de cristal où nous vivons et qui ne réfléchit jamais que notre propre face, nos propres gestes et nos propres pensées. Imaginons qu’un jour, à travers toutes les apparences qui nous emprisonnent, nous atteignions enfin les réalités essentielles, et que l’invisible qui de toutes parts nous enveloppe, nous abat, nous redresse, nous pousse nous arrête ou nous fait reculer, dévoile subi-