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LES DIEUX DE LA GUERRE

nous nous livrons davantage à celles-ci. Dès que nous avons saisi dans la nuit ou le sommeil apparent de la nature une lueur, une source d’énergie nouvelles, nous devenons souvent ses victimes et presque toujours ses esclaves. On dirait qu’en croyant nous délivrer, nous délivrons de redoutables ennemis. Il est vrai qu’à la longue ces ennemis finissent par se laisser conduire et nous rendent des services dont nous ne saurions plus nous passer. Mais à peine l’un d’eux a-t-il fait sa soumission qu’en passant sous le joug il nous met sur la trace d’un adversaire infiniment plus dangereux, et notre sort devient ainsi de plus en plus glorieux et de plus en plus incertain. Parmi ces adversaires, il s’en trouve d’ailleurs qui semblent tout à fait indomptables. Mais peut-être ne demeurent-ils rebelles que parce qu’ils savent mieux que les autres faire appel à de mauvais instincts de notre cœur qui retardent de plusieurs siècles sur les conquêtes de notre intelligence.