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L’INTELLIGENCE DES FLEURS

une petite intelligence indépendante, inlassable, imprévue. Voici deux pauvres plantes rampantes que vous avez mille fois rencontrées dans vos promenades, car on les trouve en tous lieux et jusque dans les coins les plus ingrats où s’est égarée une pincée d’humus. Ce sont deux variétés de Luzernes (Medicago) sauvages, deux mauvaises herbes au sens le plus modeste de ce mot. L’une porte une fleur rougeâtre, l’autre une houppette jaune de la grosseur d’un pois. À les voir se glisser et se dissimuler dans le gazon, parmi les orgueilleuses graminées, on ne se douterait jamais qu’elles ont, bien avant l’illustre géomètre et physicien de Syracuse, découvert et tenté d’appliquer, non pas à l’élévation des liquides, mais à l’aviation, les étonnantes propriétés de la vis d’Archimède. Elles logent donc leurs graines en de légères spirales, à trois ou quatre révolutions, admirablement construites, comptant bien ainsi ralentir leur chute et, par conséquent, avec l’aide du vent, prolonger leur