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L’INQUIÉTUDE DE NOTRE MORALE

des facultés et des aspirations de l’homme. Notre intelligence profite immédiatement des sacrifices qu’elle fait à l’imagination lorsque celle-ci caresse un idéal que celle-là ne trouve pas conforme aux réalités de la vie. Notre intelligence, depuis quelques années, est trop portée à croire qu’elle peut se suffire à elle-même. Elle a besoin de toutes nos forces, de tous nos sentiments, de toutes nos passions, de toutes nos inconsciences, de tout ce qui est avec elle comme de tout ce qui lui tient tête, pour s’étendre et fleurir dans la vie. Mais l’aliment qui lui est plus que tout nécessaire, ce sont les hautes inquiétudes, les graves souffrances, les nobles joies de notre cœur. Elles sont vraiment pour elle, l’eau du ciel sur les lis, la rosée du matin sur les roses. Il est bon qu’elle sache s’incliner et passer en silence devant certains désirs et devant certains rêves de ce cœur qu’elle ne comprend pas toujours, mais qui renferme une lumière qui l’a plus d’une fois conduite vers des