Page:Maurice Maeterlinck - L'intelligence des fleurs, 1922.djvu/137

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
125
LA MESURE DES HEURES

visage que celle que prolonge la grande aiguille de l’horloge du beffroi ou de la cathédrale. Il convient donc de n’être pas indifférent à la naissance de nos heures. De même que nous avons des verres dont la forme, la nuance et l’éclat varient selon qu’ils sont appelés à offrir à nos lèvres le bordeaux léger, le bourgogne opulent, le rhin frais, le porto lourd ou l’allégresse du champagne, pourquoi nos minutes ne seraient-elles pas dénombrées selon des modes appropriés à leur mélancolie, à leur inertie, à leur joie ? Il sied, par exemple, que nos mois laborieux et nos jours d’hiver, jours de tracas, d’affaires, de hâte, d’inquiétude, soient strictement, méthodiquement, âprement divisés et enregistrés par les rouages, les aiguilles d’acier, les disques émaillés de nos pendules de cheminée, de nos cadrans électriques ou pneumatiques et de nos minuscules montres de poche. Ici, le temps majestueux, maître des hommes et des dieux, le temps, immense forme humaine de l’éter-