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LA MESURE DES HEURES

de la lumière même qu’elles doivent contenir ; comme on verse un vin précieux non dans les verreries vulgaires de la table quotidienne, mais dans la plus pure coupe de cristal et d’argent que recèle le dressoir des grandes fêtes.

Mesurer le temps ! Nous sommes ainsi faits que nous ne prenons conscience de celui-ci et ne pouvons nous pénétrer de ses tristesses ou de ses félicités qu’à la condition de le compter, de le peser comme une monnaie que nous ne verrions point. Il ne prend corps, il n’acquiert sa substance et sa valeur que dans les appareils compliqués que nous avons imaginés pour le rendre visible, et, n’existant pas en soi, il emprunte le goût, le parfum et la forme de l’instrument qui le détermine. C’est ainsi que la minute déchiquetée par nos petites montres n’a pas même