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LES PARFUMS

générations de fleurs, que la graisse avide et captieuse, saturée d’abandons et d’aveux embaumés, refuse de dépouiller de nouvelles victimes.

La Violette, elle, résiste aux instances de la graisse froide ; il faut qu’on y joigne le supplice du feu. On chauffe donc le saindoux au bain-marie. À la suite de ce barbare traitement, l’humble et suave fleur des routes printanières perd peu à peu la force qui gardait son secret. Elle se rend, elle se donne ; et son bourreau liquide, avant d’être repu, absorbe quatre fois son poids de pétales, ce qui fait que l’ignoble torture se prolonge durant toute la saison où les Violettes s’épanouissent sous les Oliviers.

Mais le drame n’est pas terminé. Il s’agit maintenant, qu’elle soit chaude ou froide, de faire rendre gorge à cette graisse avare qui entend retenir, de toutes ses énergies informes et évasives, le trésor absorbé. On y réussit non sans peine. Elle a des passions basses qui la perdent. On l’abreuve d’alcool, on