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Le visage de Béchoux exprima une telle colère que Raoul se sauva en éclatant de rire. Puis se retournant un peu plus loin, il lui jeta gaiement :

« T’en fais pas… Tout va bien… L’épreuve du Scarabée d’or a réussi… Je tiens le bout du fil… »

Est-ce que l’épreuve tentée aux dépens de Béchoux avait réellement fourni le bout du fil à Raoul ? ou bien espérait-il découvrir la vérité par d’autres moyens ? En tout cas, il alla souvent avec Catherine jusqu’au logis de la mère Vauchel. À force de douceur et de patience, il était parvenu à l’apprivoiser, sans que la pauvre folle s’effarouchât. Il lui apportait des friandises, de l’argent qu’elle prenait d’un geste brusque, et il lui posait des questions, toujours les mêmes, qu’il répétait inlassablement.

« Les trois saules, hein, on les a déplacés ?… Qui les a déplacés ? Votre fils le savait, n’est-ce pas ? Peut-être a-t-il fait l’ouvrage ? Répondez. »

Les yeux de la vieille brillaient parfois. Des lueurs passaient dans sa mémoire. Elle aurait voulu parler, et dire ce qu’elle savait. Quelques mots eussent suffi pour que tout le mystère apparût en pleine clarté, et l’on sentait qu’à la première occasion ces quelques mots se formeraient en elle et lui viendraient aux lèvres. Raoul et Catherine en avaient l’impression profonde et anxieuse.

« Elle parlera demain, affirma d’Avenac, un jour. Soyez sûre qu’elle parlera demain. »

Ce lendemain-là, lorsqu’ils arrivèrent devant la cabane, ils avisèrent la vieille étendue sur le sol, auprès d’une échelle double. Elle avait voulu ébrancher un arbuste. Un des montants de l’échelle avait glissé, et maintenant la pauvre folle gisait, morte.