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III

L’ASSASSINAT


Le domaine de la Barre-y-va forme un rectangle, très allongé, d’environ cinq hectares, que divise inégalement la rivière de l’Aurelle. Celle-ci prend sa source en dehors des murs et traverse le parc en suivant toute sa longueur.

À droite, le terrain est assez plat. Il y a d’abord un petit jardin de curé, dans son désordre de plantes vivaces et multicolores, puis le manoir, puis de belles pelouses à l’anglaise. À gauche, un pavillon de chasse abandonné se dresse à l’entrée d’un terrain onduleux qui devient peu à peu plus sauvage et se hérisse de rochers couverts de sapins. Le mur encercle toute la propriété, sur laquelle on peut, de certains points plus élevés des collines avoisinantes, jeter des regards indiscrets.

Au centre de la rivière, une île se relie aux deux rives par les arches d’un pont de bois dont presque tous les madriers sont pourris, au point qu’il est dangereux de le franchir. Dans cette île achève de tomber en ruine un ancien pigeonnier en forme de tour.

Raoul erra de tous côtés, non point à la façon de ces détectives qui semblent des limiers en chasse, reniflant et cherchant d’où vient le vent, mais comme un promeneur qui admire, s’oriente, prend possession du paysage et fait connaissance avec les chemins et les sentiers.

« Tu es fixé ? murmura Béchoux à la fin.

— Oui, c’est un joli domaine, pittoresque, et qui me plaît.

— Je ne te parle pas de cela.

— De quoi donc ?

— Du meurtre de M. Guercin.