Page:Maurice Leblanc - La Barre-y-va.djvu/170

Cette page a été validée par deux contributeurs.

aujourd’hui, dans ce même pays de Caux, vieux pays de France où l’histoire a toujours été propice aux grandes aventures et mêlée aux grands secrets nationaux, nous nous heurtons à l’un de ces problèmes passionnants qui font tout l’intérêt de la vie.

— Que supposes-tu ?

— Ceci. Étant donné la proximité de Lillebonne (la Juliabona des Romains, capitale importante, et dont le théâtre antique prouve la vitalité durant la période gallo-romaine) quelque proconsul ayant sa maison de campagne, sa villa à Radicatel, aura dissimulé ses richesses personnelles, le fruit de ses rapines, transformé en poudre d’or, dans cet ancien tumulus bâti peut-être par les armées de Jules César. Et puis, il aura succombé au cours de quelque expédition ou à la suite de quelque orgie, sans avoir eu le temps de transmettre son secret à ses enfants ou à ses amis. Et puis, après, c’est tout le chaos du moyen âge, toutes les secousses du pays, luttes contre les hommes de l’Est, contre les hommes du Nord, contre les Anglais. Tout s’est évanoui dans les ténèbres. Même plus de légende. Le problème ne se pose même pas. À peine une bribe du passé qui surgit au XVIIIe siècle… un peu d’or qui coule. Puis le drame qui se prépare… M. Montessieux… M. Guercin…

— Et toi qui apparais ! murmura Béchoux de ce ton d’admiration presque mystique qu’il prenait parfois en parlant à Raoul.

— Et moi qui apparais ! » répéta Raoul avec gaieté.

Les deux sœurs le regardèrent, elles aussi, comme on regarderait un personnage d’essence particulière, en dehors des proportions humaines.

« Et maintenant, dit-il, en se levant, travaillons. Qu’est-ce qui subsiste du trésor de mon proconsul ? Peut-être pas grand-chose, soit qu’il fût, à