mètres de distance, entre les arbres — ça se passait sur la route, près d’ici — il y avait quelqu’un que j’entrevoyais dans l’obscurité.
— Quelqu’un qui était avec lui, ou qui l’épiait ?
— Je ne sais pas… Je lui ai dit : “Il y a quelqu’un…” Il m’a répondu : “Je m’en moque.”
— Comment était-il, ce quelqu’un ?
— Je ne sais pas. Je n’ai vu que son ombre.
— Comment était-elle, cette ombre ?
— Je ne pourrais pas dire. Tout de même j’ai vu qu’elle portait un grand chapeau.
— Un très grand chapeau ?
— Oui, comme un chapeau à très larges bords, et à très haute calotte.
— Tu n’as rien d’autre de particulier à me signaler ?
— Rien.
— Tu n’as pas la moindre opinion sur l’assassinat de M. Guercin ?
— Aucune. J’ai pensé seulement qu’il y avait peut-être un rapport entre le criminel et l’ombre que j’avais aperçue.
— Probable, dit Raoul. Mais ne t’occupe pas de tout cela, Fameron. N’y pense plus et dors. »
Avec une poussée douce, il obligea Fameron à s’étendre, lui remonta ses draps jusqu’au menton, le borda et s’en alla sur la pointe des pieds, en lui recommandant de faire dodo bien sagement.
Lorsque Arsène Lupin raconta, par la suite, le rôle qu’il joua, sous le nom de Raoul d’Avenac, dans l’aventure de la Barre-y-va, il fit à ce moment une petite digression psychologique :
« J’ai toujours constaté que, en pleine crise d’action, on se trompe sur l’état d’âme de ceux qui s’y trouvent mêlés. On les juge avec perspicacité pour tout ce qui concerne l’action où l’on est engagé, mais leurs pensées secrètes, en dehors de cela, leurs sentiments, leurs goûts, leurs projets