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parlant théâtre, sport, musique, chiffons, connaissant l’adresse de toutes les filles un peu cotées sur la place, saluant et se flattant de connaître auteurs, acteurs, directeurs, régisseurs, gens de lettres de tout poil et de toute nuance, hommes politiques, députés, sénateurs et gens titrés du noble faubourg, la société de ce personnage était plus inévitable que recherchée.

S’agissait-il d’organiser un dîner, un souper, un bal ou toute autre partie du même genre, vite on le voyait se glisser gratis dans la combinaison, sous prétexte d’une économie de dépense ou d’une amélioration de service qui seraient obtenues par ses soins.

Un projet d’emplette, la recherche d’une adresse, une démarche dans un ministère, une visite à l’Hôtel des Ventes ou dans une galerie de tableaux le trouvaient immédiatement prêt à offrir ses bons offices. Du reste, qu’on lui fît bon ou mauvais visage, son attitude était toujours la même ; l’aménité de son langage, ses formes obséquieuses, ses saluts corrects finissaient par venir à bout de toutes les résistances. On renonçait à l’éviter quand on le rencontrait, et il imposait toujours sa conversation à ceux qui l’avaient une fois salué.

Ce singulier personnage, qui répondait au nom de du Clocher, et qui joue un certain rôle dans cette histoire, aperçut tout à coup un autre jeune homme de fort belle mine qui venait d’entrer en jetant négligemment son pardessus aux mains du garçon, qui le salua avec des égards particuliers.

― Quoi ! vous ici, cher vicomte, dit du Clocher en faisant son salut le plus mondain au nouveau venu. C’est donc aujourd’hui le rendez-vous des illustrations ?