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l’audience, des sergents de ville, des gendarmes, des geôliers. Tantôt c’est une famille anglaise qui s’enquiert auprès d’un gardien des choses que l’on peut visiter dans le Palais ; tantôt c’est un plaideur fourvoyé qui vient vous demander où se trouve telle audience, où est le cabinet de tel juge d’instruction, où s’habille tel avocat.

Il y avait à cette époque, installés aux quatre coins de la salle, des bureaux d’écrivain public où l’on voyait l’écrivain assis, le chapeau sur la tête, devant une petite table noire dont s’approchait de temps à autre un ouvrier ou un homme de la campagne pour faire écrire une lettre ou une pétition.

C’était une des mille particularités de cette immense salle, où le samedi, pendant deux ou trois heures, c’est un bourdonnement, un fourmillement, un mélange de monde, des allées et des venues, des bruits de portes qui s’ouvrent et qui se ferment pour livrer passage à des entrants, à des sortants ; des colloques, un brouhaha qui font ressembler ce grand vaisseau à un marché public ou à une foire.

Au barreau comme dans tous les milieux, les hommes se rapprochent, se groupent et se classent selon les rapports d’éducation, de fortune et de talent. Malgré l’égalité professionnelle, il y a toujours une distance qui se fait sentir entre un avocat arrivé et celui qui ne l’est pas, et l’humble stagiaire qui débute salue bien bas son illustre confrère qu’environne le prestige de la renommée.

Cependant, comme il existe une bienveillance réelle dans les rapports du barreau, il n’est pas rare de voir de jeunes débutants s’introduire dans la société des grands avocats en leur faisant une cour discrète, en