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Une autre pensée le calmait encore ; il avait envoyé à Hector d’Havrecourt la lettre d’Isabeau et il se disait : Si Hector peut me haïr, parce que moi aussi je l’ai outragé, à présent, du moins, il ne peut plus me croire infâme.

À quatre heures, à cinq heures, à cinq heures et demie, Karl n’était pas arrivé.

— C’est extraordinaire, pensa Georges ; je vais aller chez lui ; et il se félicitait d’être tombé à peu près d’accord avec M. de Marcus sur les bases d’une transaction à intervenir. Son plan était arrêté. Il se proposait de conduire le soir même Karl chez M. de Marcus et de le faire traiter directement avec le comte sans passer par l’intermédiaire de Doubledent. Il comptait aller ensuite chez Doubledent et lui faire des offres catégoriques pour la remise des pièces dont il était porteur.

Malheureusement la journée s’était presque entièrement écoulée sans qu’il pût voir Karl ; dans la position extrême où se trouvait le jeune avocat, il n’y avait pas à balancer ; il résolut d’aller chez le comte avec Karl, même à une heure avancée de la soirée. Mais, quand il revint, Karl rentré une demi-heure auparavant venait de sortir ; on lui répondit que le jeune devait être à sa pension.

— Karl, après être rentré et avoir lu mon billet de ce matin, n’est pas venu chez moi, et il est en ce moment rue Saint-Jacques ! — se dit Georges Raymond. — Qu’est-ce que cela signifie ?

Il prit tout troublé le chemin de la rue Saint-Jacques ; son cœur était serré. Il lui en coûtait, dans les dispositions d’esprit où il se trouvait, d’affronter la table du père Lamoureux, où il n’avait pas reparu depuis plus de deux mois.