Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/297

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Maintenant, je ne pourrai plus le voir en face, cet homme !

Georges faillit pousser un cri de douleur. Au milieu de cette nouvelle commotion, il avait oublié l’effroyable incident du coffret, suspendu sur sa tête comme le tranchant du couteau sur le cou du condamné.

Allons donc ! se dit-il en secouent son désespoir comme un sanglier criblé de coups ; qui sait si ce n’est pas tout simplement quelque guet-apens que cet homme m’a tendu ? ne soyons pas dupe jusqu’à la fin. Voyons ce que c’est que cette histoire du coffret, allons rue Contrescarpe.

On se rappelle qu’ils avaient rendez-vous à sept heures chez Magny.

Il passait pour s’y rendre devant chez lui, lorsque la veuve Michel, qui paraissait guetter son retour sur le pas de la porte, lui remit la lettre du vicomte. Il la déplia en pressentant quelque chose de sinistre et il lut :

« Monsieur, vous êtes le dernier des misérables ; vous êtes allé livrer à la police le dépôt sacré que j’avais confié à votre honneur. J’étais venu pour vous casser la tête comme à un chien ; il vaut mieux que je ne vous aie pas rencontré. Demain matin, je serai à sept heures au bois de Vincennes, avenue d’Orléans, accompagné de deux témoins. Je vous y attends dans la même forme. Épée ou pistolet, il n’importe ; vous comprenez que c’est la mort pour l’un de nous deux.

» Si vous n’étiez pas exactement à ce rendez-vous, je me charge de vous faire sauter la cervelle dans la journée, quand bien même vous iriez encore montrer cette lettre à la police.