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cesse de l’argent. Hector ignorait que Doubledent avait racheté toutes ses dettes à vil prix, et que, quand il payait quelques-uns de ses créanciers, il ne faisait que rembourser Doubledent, qui, sous des prête-noms, exerçait sans cesse des poursuites allant jusqu’à la saisie.

Un jour, Hector eut besoin de dix mille francs ; Doubledent les lui prêta en le priant seulement de signer en blanc avec son bon, ou approuvé, une feuille de papier timbré qu’il lui présenta.

— Nous régulariserons ensuite les conditions du prêt, dit négligemment Doubledent ; je suis pressé.

Hector d’Havrecourt, écrasé de poursuites, ayant trois mille francs de dettes de jeu à payer le soir même, acculé à une impasse terrible, donna la signature que Doubledent demandait. Quelques jours après, il comprit quelle arme redoutable il avait remise entre les mains de cet homme, étant donnée la trempe de son caractère. Il voulut reprendre ce blanc-seing, et s’abandonnant, ce qui lui arrivait rarement, à la violence de son caractère, il fit mine de porter la main sur l’agent d’affaires.

— Monsieur Harveux-Court, petit-fils de François Harveux et de demoiselle Catherine-Florimonde Court, exploitant ensemble l’hôtel du Cheval-Blanc, à Senlis, ainsi qu’il résulte des actes de l’état civil qui sont là, dit Doubledent en boutonnant son paletot et en portant la main à la crosse d’un revolver qui était toujours sur sa cheminée — il est bien vrai qu’avec le blanc-seing que vous m’avez remis je pourrais vous faire aller en cour d’assises, si cela me faisait plaisir ; mais l’intérêt est la mesure des actions, et je ne vous nuirais qu’à regret parce que j’ai placé sur votre tête mes petites