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En terme de pratique, on appelle placet les conclusions des deux parties adverses, couchées sur de grandes feuilles de papier blanc, que le président a sous les yeux pendant que les avocats plaident, et qui sont remises chaque matin à l’huissier audiencier pour faire l’appel.

Georges Raymond jeta avidement les yeux sur le placet que le greffier lui tendait d’un air maussade, comme cela se fait pour de jeunes avocats sans notoriété ou que l’on ne connaît pas personnellement ; les premiers mots qui tombèrent sous ses yeux furent ceux-ci :

« Attendu que les biens mobiliers et immobiliers que Mlle de Nerval a recueillis dans la succession de sa mère, Mme Daniel Bernard, et qui peuvent être évalués à cinq millions, n’ont pu lui être transmis régulièrement par cette dernière

» Qu’en effet, M. Daniel Bernard, le de cujus, n’était autre que le susnommé Karl Elmerich, lequel a laissé un fils portant les mêmes nom et prénom que son père, ainsi qu’il résulte d’actes de l’état civil réguliers, qui seront produits en temps et lieu.

» Attendu que M. Karl Elmerich fils, aujourd’hui majeur, est donc l’héritier naturel et légitime de son père, décédé le 29 mars 1863, à Paris, sans laisser de testament, et qu’il a seul droit à sa succession, à l’exclusion de Mme Daniel Bernard, qui n’a pu ni la recueillir, ni la transmettre à sa fille ;

» Attendu que M. Karl Elmerich fils est vivant, ainsi qu’il sera établi en son lieu ;

» Attendu que M. Doubledent, créancier de Karl Elmerich de sommes considérables, ainsi qu’il sera