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— Oh ! mon cher ami, qu’elle est belle ! lui répondit Georges à l’oreille, et il allait lui conter sa bonne fortune ; mais il s’abstint dans la crainte d’escompter prématurément son bonheur.

— Eh bien ! vicomtesse, que pensez-vous de ce débutant qui valse du premier coup avec la comtesse de Tolna ?

— Si j’ai été plus heureux que je ne le méritais, madame, je le dois à votre bienveillant accueil, dit Georges qui voyait Raffaella tourner vers lui ses yeux de saphir.

Pendant que Mme de Saint-Morris répondait par un sourire à ce propos gracieux, deux personnages placés à quelque distance paraissaient s’entretenir avec beaucoup d’animation dans une langue étrangère. L’un était le marquis de Saporta, que nous avons vu tout à l’heure avec la comtesse de Tolna, l’autre était l’inévitable du Clocher, que le lecteur se souvient d’avoir rencontré quelques jours auparavant au cercle de la rue Bergère. Du Clocher se confondait, comme toujours, en contorsions aimables, tandis que son interlocuteur, cavalier de la plus belle mine et du plus grand air, l’écoutait en approuvant par des signes de tête.

— Je vous affirme, Excellence, que c’est bien le secrétaire particulier du comte de B***, et très probablement le messager confidentiel de cette correspondance dont je vous parlais tout a l’heure, qui inquiète tant le gouvernement impérial… ajouta du Clocher à l’oreille du noble espagnol, en lui indiquant d’Havrecourt par un geste imperceptible. C’est presque un secret d’État, monsieur le marquis, que j’ai confié à votre haute discrétion…